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mercredi 11 janvier 2012

Alors, déclin US ou pas déclin ?

Yapadaxan est un vieil ami des forums, qui reparaît depuis peu après une longue absence. Il excelle dans les avis très pertinents, et cette intervention d'hier dans Le Grand Soir est un chef-d'œuvre.
10/01/2012 à 13:54, par yapadaxan

Alors, déclin US ou pas déclin ?

Les USA traversent la crise systémique qui frappe l’Occident. L’enrichissement des plus riches provoque l’appauvrissement des plus pauvres, car tel est le contenu de cette crise : le capitalisme est hors contrôle, il impose lui-même, en tant que système, ses propres lois qui le contraignent à se mettre toujours plus en valeur au détriment des couches sociales paupérisées par le chômage et la compression des salaires. Le capitalisme, s’il devait perdurer, accroîtrait cette tendance. Ce qui est tout bonnement impossible.

Aussi, comme en Europe, assiste-t-on à une hyper droitisation de la classe politique et d’une frange de la population. Hyper droitisation qui consiste en une fascisation de l’appareil d’Etat, tout entier au service de ce que l’on appelle le complexe militaro-industriel.

Si l’on ne prend pas en compte l’Histoire même des Etats-Unis, on ne peut pas comprendre son évolution qui nous amène à aujourd’hui.

Les USA se sont bâtis sur un génocide et sur l’esclavage. Ce génocide et cet esclavage, assortis d’un racisme virulent, sont le fait, d’abord du peuple, ensuite de l’Etat. Peuple et Etat étant co-responsables de l’un et de l’autre. Et même, co-coupables.

Les USA, comme toute nation, s’est écrit un roman national et s’est inscrit dans un système d’autoreprésentation qui part de la conquête de tout un territoire aux dimensions d’un sous-continent. Si la naissance du pays se fait au nom de l’indépendance et de la liberté, celles-ci ne concernent que la communauté des colons blancs. Elle est exclusive des populations amérindiennes et noires. Comme Israël se définit comme la Terre promise au peuple élu, l’Amérique est la Terre promise au sens protestant du Nouveau Testament. Le peuple élu est au départ le peuple des colons protestants ayant fui les persécutions religieuses en Europe.

Les USA se vivent comme un vaste territoire à prendre, à cultiver, à fructifier. Point d’ascendance, point de titre de propriété. Tout individu peut s’enrichir en devenant propriétaire. Les populations, venant de sociétés lourdement hiérarchisées socialement, constatent, entre elles, une égalité sociale qui amplifie le sentiment démocratique.

Toutes ces données, proprement inédites dans l’Histoire des sociétés humaines, fournissent tout un appareillage mental d’autoreprésentation nationale et de mythification de cette représentation. Forte de l’idée que cette nouvelle nation a vocation religieuse à éclairer le monde, sa propension à l’impérialisme mondial lui est comme une évidence. Cette société apparemment sans classes, sans Histoire ni mémoire, sans pesanteurs des vieilles sociétés, bénéficie d’une liberté d’action dans ses frontières, quant à son développement, et hors de ses frontières, pour ce même développement. Essentiellement économique.

De fait, les USA, dès leur création, entrent dans le capitalisme et l’industrialisation. Et très rapidement, l’idée capitaliste de l’accaparement des richesses s’impose. Fondée sur la réalité de l’espace vital à combler, sur l’élimination physique de peuples préinstallés, sur l’importation massive d’esclaves, cette nation, convaincue de son rôle messianique, verse dans l’impérialisme le plus brutal.

Le néoconservatisme précède et succède au nazisme. Loin d’avoir eu à théoriser le génocide et la supériorité de la race, la nation américaine s’est fondée dans la pratique du génocide et de l’esclavage foncièrement raciste. Dès 1918, à Versailles, les USA se hissent au niveau de leadership, leadership qui sera absolu en 1945.

Depuis, c’est une série de guerres et de dictatures. Aujourd’hui menacé par sa propre crise, le capitalisme US continue follement à accélérer ses contradictions. Celles-ci le mènent soit à sa propre perte, soit à la seule issue possible : la guerre mondiale.

3 commentaires:

  1. On oublie aussi qu'une partie de la population blanche immigrée aux Etats-Unis payaient leur droit de passage en signant des contrats qui faisaient d'eux des esclaves pour des années. Ceux dont j'ai pu prendre connaissances portaient sur des durées de 5 et 7 ans.
    Un très bon livre de Nancy Delanoë, dont j'ai oublié le titre mais qui reprend l'histoire des traités avec les natifs et leur réduction progressive comme peau de chagrin mets en parallèle deux écrit de Washington? l'un officiel interdit la spéculation sur un ensemble de terre volées aux natifs, ces terres devant être attribuées aux colons blancs suivant des critères "équitables", l'autre secrète est adressée à son homme de paille et lui ordonne de racheter en sous-main autant de ces terres qu'il pourra le faire. Cela pour remettre un peu plus en question ce grand mythe.
    Ensuite, la guerre de sécession n'est pas une guerre de libération des esclaves, mais une guerre qui a pour but 1) de s'approprier les terres du Sud 2) de se créer un main d'oeuvre corvéable à merci pour les industries en pleine expansion des yankees. Autre partie du mythe donc qui ne tient pas la route.
    Ensuite, j'ai passé quelques semaines à New-York, une seule fois dans mavie, il y a une trentaine d'année, et déjà j'étais interpellée par la faille profonde et large que constituait la différence entre ce que je pouvais constater de visu et ces USA hollywoodiens matraqués en permanence par une télévision omniprésente? il y en avait déjà à l’époque plusieurs postes par ménage.
    Ensuite en passant sur nombres autres arguments qui contredisent cette production de mythe, j'ai été choquée à la lecture du discours d'Obama de septembre qui correspond à la liquidation officielle du "rêve américain", s'exprimant au nom du peuple, il dit :
    "Ce que vous voulez, c'est pouvoir donner une éducation à vos enfants, accéder à la propriété et mettre un peu Je souligne le peu. A.) d'argent de côté pour votre retraite."
    Où est donc passée cette démesuré qui pouvait être énervante mais avait aussi souvent son charme ? Un rêve de petits bourgeois à faire pleurer Brassens.
    Non plus un signe mais une preuve très claire de ce que conjuguée au déclin, il y une décadence totale... la vie s’accommode très mal des routines, l'évolution est une constante réinvention... auto, boulot, dodo, avec le petit détour pour la caisse d’épargne afin d'y poser quelques misérables noix... seuls des pas tout à fait vivants et pas très humains peuvent s’accommoder d'un tel programme sans se rebeller ou sombrer dans la neurasthénie.

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  2. Oui, "yapadaxan" (pseudo tout raide!) nous donne une très belle analyse de la particularité inouïe de l'histoire réactionnaire (et pire) du peuple américain. On y comprend mieux, par exemple, la complicité-proximité des idéologies (bibliques) du peuple américain et de son quasi-surgeon israélien...
    Mais il y a aussi, à sa façon, une lutte de classes aux USA (en Israël aussi)comme le révèle si bien l'historien E.Zinn...

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  3. Bien sur, Rem*, mais comme disait ce milliardaire de Warren Buffet,
    « Il y a une guerre des classes, c’est un fait, mais c’est ma classe, la classe des riches, qui mène cette guerre, et nous sommes en train de la gagner »

    La gauche US existe, mais elle n'a guère l'occasion de s'exprimer publiquement, sans doute bien moins encore qu'ici. Quant à la lutte des classes effective, elle "fait doublon" avec les disparités ethniques la plupart du temps, ce qui n'aide pas à bien la cerner. Le "petit blanc" miséreux est encore au-dessus des colored people.

    J'ai bien aimé le film "J'irai dormir à Hollywood", d'Antoine de Maximy, qui aborde le peuple US au plus près. Les plus démunis, bien sûr, ce sont les amérindiens, ceux qui comme le hurle Bécaud, "n'existent pas".

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