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lundi 2 janvier 2012

Wall Street et problèmes du monde

Avec amusement, je découvre une dépêche de l'agence Reuters qui annonce

Les problèmes de Wall Street en 2011 seront encore là en 2012 

Je ris, car les problèmes du monde tiennent justement dans ce coin de New York, et son homologue londonien de la City. S'y ajoute, pour faire bonne mesure, le marché aux matières premières de Chicago.  C'est là que se dénouent les spéculations de tous les traders de la planète, de toutes les banques d'affaires, de tous les fonds de pension affichant un rendement de 5 à 10% de vos petites économies quand l'époque  est à la récession et à la déflation. Plus fort encore, certains y parviennent : pour cela ils n'hésitent pas ruiner quelques concurrents moins adroits, des petits porteurs, et bien sûr les salariés des entreprises qui sont sensées être l'objet de ces transactions. Le marché, c'est cela, et rien d'autre. Une foire d'empoigne, où les petits et les sans grade y laissent des plumes à coup sûr. Ne surnagent que les plus gros, et encore pas toujours s'ils ont été un peu trop imprudents. Il faut dire que souvent, pour lancer une opération, il faut avoir derrière soi d'énormes liquidités, réelles, ou disponibles à crédit, au cas où un report de position s'impose. Ce qui est fréquent.

 

Il faut se souvenir du cas Kerviel : pour "tenir" des positions déjà énormes, il avait mobilisé la totalité des avoirs de la Générale, soit dix fois plus. C'est seulement parce que la banque n'a pas voulu plus longtemps suivre sur cette opération-là qu'elle a perdu autant. Cela cachait d'ailleurs d'autres pertes peut-être moins avouables, d'après ce qui s'est dit.

 

Dans l'affaire, il faut bien se dire que l'investissement dans une industrie à développer, facteur positif d'avenir, est totalement occulté par le gain quasi immédiat : les valeurs changent de main à toute allure souvent, au gré de murmures, de bruits, d'intuitions, plus proches de Madame Irma que d'une saine gestion. C'est bien pourquoi des institutions comme Wall Street, si elles ont eu au tout départ une certaine utilité (pas plus), ne sont plus au contraire que les fossoyeurs de notre planète et de ses habitants.

 

Il serait indispensable que les spéculations deviennent impossibles, que les positions ne puissent plus se faire à terme avec possibilité de report, qu'on ne puisse vendre que ce qu'on possède déjà, et acheter qu'avec l'argent qui figure déjà sur le compte, à la banque. Que les banques ne puissent plus utiliser l'argent déposé par leurs clients pour spéculer, que le Glass-Steagall Act soit remis en service, séparant banques de dépôt et banques d'affaires. Les solutions existent, les mettre en place n'est qu'un acte politique.

 

Qui osera le faire, qui prendra le risque de se mettre à dos les banques comme Goldman Sachs, qui n'a pas hésité à tout faire pour ruiner un pays comme la Grèce, simplement pour assouvir ses appétits financiers ?  Et quand on parle de risque, il s'agit sans aucun doute de la vie même du législateur obstiné qui voudra faire le ménage à la maison. Un homme seul ne le pourra jamais, il devra être porté par une robuste opinion ayant compris l'enjeu, et soutenant l'action de mille manières. C'est pourquoi il est à craindre que ce ne soit pas pour demain. Avec une opposition comme il l'a, un Obama même motivé ne le pourra pas. Car c'est aux États-Unis, nécessairement, que tout pourra se jouer, ou non.

 

Et pour finir, juste une mise en garde. Sur le marché des marchandises, celui dont on ne parle guère, la situation est pire encore. C'est pourquoi notre planète regorge de nourriture, mais quelques spéculateurs internationaux, de grandes maisons discrètes, stockent pendant plusieurs années, s'il le faut, des produits aussi essentiels que le blé ou le riz, laissant les cours monter par faute de pénurie, et lâchant les stocks au moment le plus propice, au plus haut. La mort de centaines de milliers d'enfants par malnutrition et famine ne leur fera pas lever un cil. Leurs noms ? Glencore, Cargill... il y en a d'autres.

6 commentaires:

  1. Pour préciser ce que certains vont peut-être mal comprendre, il faut savoir que chaque mois vous devez livrer les titres que vous avez vendus au cours du mois, même si vous ne les avez pas ; en revanche, si vous avez acheté ces titres, il vous faudra les payer. Si vous reportez, soit vous "louez" ces titres à un intermédiaire pour un mois, soit vous empruntez pour un mois la somme correspondante à un taux fixé d'avance. Ces sommes que vous payez soit pour "louer" des titres, soit pour "louer" l'argent, s'appellent le report. Il faut être bien sûr de soi, ou spéculateur jusqu'au bout des ongles, pour reporter une fois, deux fois, trois fois...

    Si vous ne pouvez pas, en catastrophe vous achetez les titres qui vous manquent la veille de la "liquidation", ou vous trouvez les fonds manquant en empruntant comme vous pouvez, ou en vendant d'autres titres. C'est ce que la Générale avait fait pour dénouer les positions de Kerviel. La clause est impérative : à la liquidation, tout ce qui a été acheté au cours du mois doit être payé, tout ce qui a été vendu doit être livré.

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  2. Je rejoins les propositions de Paul Jorion: taxer ces spéculations à la baisse, à découvert, ... pour ce qu'elles sont: des jeux de hasard, taxés en France à près de 50%.

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  3. Coucou Babel

    on t'embrasse tous très fort en te souhaitant le meilleur pour 2012

    merci pour tes bons posts je vais en relayer

    affectueusement eva

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  4. Ah, Cargill à Saint-Nazaire, quelle histoire !
    C'est en 1964 qu'il s'est installé là, en toute première implantation en France (il y en a une douzaine d'autres, depuis°. Ce fut (c'est toujours) en s'appuyant sur la hideuse base des sous-marins nazis que l'usine s'est créée pour "triturations de soja et de maïs" (dont OGM), venus d'Amérique sur la flotte Cargill. L'usine monstrueuse est classée "danger Seveso" depuis le drame que l'on sait... et doit impérativement (un jour!...) déménager de là (proximité de la ville et du port).
    Pendant plus de 10 ans (ou 15?) ce classement a interdit la création du théâtre de la ville, sur la ruine de l'ancienne belle gare maritime, située à proximité... Mais, miracle (!?), il semble que ce classement soit levé, sans que l'usine déménage : le théâtre se construit donc depuis 2 ans et ouvrira sans doute dans l'année...
    Elle est pas belle la vie ?
    Et l'alimentation de nos troupeaux... voire de nos enfants (via "les petits pots")?

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  5. Cargill aurait allongé quelques subsides à la municipalité ?
    J'ai appris hier en me promenant près du port, qu'il y avait 6 sites classés "Seveso" (1 ou 2, selon leur dangerosité) le long du port de saint Nazaire ! Quant à Cargill, de temps en temps, ça pue... merci qui ?
    J'ai appris aussi que la France exportait (par bateaux) de l'essence raffinée (la raffinerie qu'on voit depuis la voie ferrée) aux USA... mais importait (par bateaux) du gaz-oil aux mêmes USA.

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  6. Pour le gasoil, c'est logique, Clo : aux USA pratiquement seuls les trains utilisent le Diesel, au lieu de l'électrique : en revanche ici ce sont les voitures, bien plus nombreuses, qui roulent au "lourd".

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